Le mousquetaire
«Un mousquetaire rouge qui, après avoir nargué, de l’Europe à l’Asie, juges, policiers, gendarmes, ministres même, finit par nous avouer tout bas qu’il n’est pas anarchiste parce que le mot lui-même est encore un classement!» écrivait Clemenceau à propos de cet homme épris de liberté, réfractaire à l’autorité, qui passa la moitié de sa vie à fustiger l’armée et la magistrature, l’autre à arpenter le monde, parce que «la sagesse est de ne pas rester».
Personnage fascinant, anarchiste hors de l’anarchie, voyageur impénitent, Alphonse Gallaud, plus connu sous le pseudonyme étrange de «Zo d’Axa», fut l’un des pamphlétaires les plus virulents de son époque ce qui lui valut une multitude de condamnations et d’exils. Avec sa barbe taillée en pointe, son chapeau de feutre à larges bords, sa cape de bure rejetée sur l’épaule, cet excellent escrimeur avait le profil d’un mousquetaire.Il en avait le panache.
"Après deux biographies de Khalil Gibran et d'Ernest Pinard, Alexandre Najjar nous fait (re-) découvrir Alphonse Gallaud, pamphlétaire inclassable. "Ce qui m'a séduit, raconte l'écrivain, c'est son amour de la liberté, son indépendance absolue." Dès son plus jeune âge, Zo d'Axa se sent en dehors de la société. Tellement "en dehors" qu'il baptise son premier journal, à 27 ans, ainsi."
"Cette biographie vaut tous les romans !"
"Alexandre Najjar aime, de toute évidence, aller d'un extrême à l'autre. En 2001, il faisait paraître une biographie du redoutable procureur Pinard, le magistrat qui avait persécuté à la fois Baudelaire et Flaubert ; à présent, il publie celle de Zo d'Axan, "le mousquetaire rouge" ainsi que devait le définir Clemenceau, sans doute un des plus virulents pamphlétaires de la fin du XIXe siècle."
"Coursé par toutes les polices du monde, s'évadant de Jaffa pour gagner Jérusalem avant de filer à Instanbul, Zo d'Axa ne fut arrêté que par une balle, celle qu'il se tira dans la tête après la mort de sa femme. L'hommage que lui rend l'avocat et écrivain libanais Alexandre Najjar traduit toute son admiration pour un homme qu'il aurait sans doute adoré défendre on naît parfois trop tard..."
"C'est une louable initiative de rappeler la mémoire de ce personnage étonnant, anarchiste hétérodoxe, bourlingueur et journaliste pamphlétaire que Clemenceau baptisa "Le Mousquetaire"... Le style alerte d'Alexandre Najjar, jeune avocat et romancier libanais à qui l'on doit déjà une biographie du procureur Pinard, restitue autour de cette figure singulière de l'individualisme anarchiste, un monde et une société apeurés par tant d'audace."
"Une biographie pleine d'analogies !"
"Ce fanatique de la liberté, ce pamphlétaire inclassable finit par nous séduire."
"Alexandre Najjar a réussi à nous conter les détails d'une vie singulière, sans jamais sombrer dans la monotonie, et à la situer harmonieusement dans son contexte social."
Introduction
Choisir le sujet d'une biographie n'est jamais aisé : faut-il opter pour des figures de proues maintes fois disséquées ou pour des inconnus dont nous avons tout à apprendre? Quel intérêt peut-on trouver à «l'antépénultième récit de la vie de tel monarque ou de tel écrivain, compilé par un polygraphe qui n'a rien de neuf à apporter»? En consacrant une biographie à Zo d'Axa, le parti pris est clair : faire connaître un personnage d'exception tombé dans l'oubli; réparer l'erreur de certains essayistes que le mot «anarchie» horripile et qui ont jugé bon de mettre en quarantaine l'un des plus grands pamphlétaires du XIX siècle. Cet «oubli» , Zo d'Axa en porte en partie la responsabilité.Car enfin qu'a-t-il fait pour assurer la pérénnité de son œuvre? Pourquoi n'a-t-il pas, à l'instar d'autres écrivains, organisé son entrée dans le panthéon des lettres et construit, de son vivant même, son propre mausolée? Conscient que les pamphlets sont souvent éphémère en raison de leur actualité, que n'a-t-il consacré plus de temps à son œuvre poétique ou romanesque? Et pourquoi s'est-il placé délibérément en marge de toutes les écoles et du mouvement anarchiste? Affublé d'un nom de guerre à coucher dehors (inspiré, paraît-il, du grec : Zo qui signifie «je vis» et DAX qui veut dire «en mordant»), il fut d'une telle indépendance d'esprit, d'un tel détachement, qu'il ne revendiqua jamais ni reconnaissance ni gloire. Réhabiliter pareil écrivain est, au fond, une mission périlleuse, tant il est vrai que l'ignorance dans laquelle se trouvaient les lecteurs laisse la place, lorsqu'on les confronte à son œuvre exhumée, au doute et à la suspicion : d'où sort-il? Pourquoi nous en parle-t-on aujourd'hui? comme s'il eût fallu le garder dans l'ombre par acquit de conscience.
«Il ya chez ce militant un rebelle absolu, un sens infaillible de ce qui, même dans les meilleures causes, menace la liberté, parcelle de feu ...» Ces lignes que Renaud Matignon consacra à André Breton pourraient tout aussi bien s'appliquer à Zo d'Axa : réfractaire à toutes les sujétions, «empanaché d'indépendance et de franchise» - pour reprendre la formule d'Edmond Rostand dans Cyrano de Bergerac -, épris de justice sociale et de vérité, conséquent avec lui-même jusqu'à la dernière seconde de son existence - puisqu'il choisit de partir plutôt que de laisser la mort l'emporter -, nomade infatiguable, révolté impénitent sans être véritablement anarchiste -«parce que le mot lui même est un classement» -, Zo d'Axa était pareil au vent : libre, pur, insaisissable, cinglant, violentà l'heure de la tempête, il savait s'insinuer dans les esprits, briser les branches mortes, secouer par le souffle de son esprit ceux qui se vautrent dans la médiocrité. Clemenceau l'appelait «le mousquetaire». Était-ce pour son physique, sa barbe rousse taillée en pointe, sa cape qui ne le quittait pas? Ou parce que ce descendant de mousquetaire excellait dans l'art de l'escrime et qu'il remportait tous ses duels? Il ya davantage : toute sa vie Zo d'Axa vécut avec le panache d'un mousquetaire.