La Passion de Lire

La Passion de Lire

La lecture est en perte de vitesse, dit-on. Supplanté par la té­lévision et les nouvelles technologies, le livre serait menacé de disparition.  Pourtant, la lecture procure un plaisir indicible, enrichit l’âme et l’esprit, constitue une porte ouverte sur l’imaginaire. Le livre, objet inimitable, est aussi synonyme de liberté : en même temps qu’il ins­truit ou divertit le lecteur, il lui permet de s’émanciper.

Cet album se veut un hommage au livre et à la lecture. En partant de Byblos, berceau de l’alphabet, il nous pro­pose, à travers mots et photos, de visiter des lieux de lecture et de rencontrer des lecteurs en situation. Afin que lire de­vien­ne – ou de­meure – votre pas­sion !

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"La Passion de lire", texte d'Alexandre Najjar et photos de Hayat Karanouh Quand le mot et l'image fusionnent… Un beau livre d'étrennes, justement pour donner un avant-goût de la lecture. Avec un titre on ne peut plus explicite : La passion de lire , édité en format luxueux à Dar an-Nahar (133 pages). Sur un texte écrit par Alexandre Najjar (avec un judicieux choix de citations d'écrivains aussi bien arabes qu'étrangers) et des photos savamment synchronisées avec l'écriture de l'auteur des Éxilés du Caucase , voilà une belle promotion pour les livres, miroirs, amis et témoins de la vie. Apologie de l'écriture et éloge des livres qui sont nos indéfectibles amis. Vibrant hommage à toutes les littératures du monde, inépuisables trésors contre la solitude et l'ennui, pour un compagnonnage où rêves, imaginaire, culture et horizons à perte de vue sont généreusement dispensés. Cet album (car c'en est un!) avec ses photos éloquentes et de qualité (en noir et blanc ou en couleurs) retrace un itinéraire riche allant des rives de Byblos, berceau de l'alphabet, pour flâner en douceur entre les rayons des librairies et des bibliothèques, confortablement calfeutré dans un fauteuil, assis sous un cèdre millénaire ou nonchalamment allongé sur un lit. Non seulement la passion de lire, mais aussi la grâce, la bénédiction de lire qu'on devrait transmettre en toute simplicité et humilité à nos enfants, à nos amis, à tous ceux que nous aimons... Instruction, rêve, voyage, connaissance, savoir, enrichissement spirituel et intellectuel et bien sûr divertissement et épanouissement, c'est tout cela les livres et la lecture. Menacé de disparaître le livre ? Qu'on se tranquillise, la technologie de pointe contemporaine aura beau nous éblouir, le livre garde encore farouchement ses ardents défenseurs et sa valeur inaliénable. Comme ce livre qui tresse amoureusement ses éloges, prône et assure, avec pièces à conviction, que lire, tout en étant un « vice impuni » (selon Valéry Larbaud), est aussi une très saine passion.

L'Orient-Le Jour, 9 janvier 2006.

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Photos © Hayat Karanouh

Tout a commencé à Byblos, la cité du livre. L’étymologie du nom le prouve : bublos en grec signifie « papyrus » ; biblion veut dire « livre ». C’est là qu’a été créé, au XIe siècle avant J.-C., l’alphabet de vingt-deux lettres qu’on retrouve sur le sarcophage d’Ahiram, roi de Byblos, conservé au Musée de Beyouth. Cette écriture phénicienne, diffusée par le légendaire Cadmus, fils de Tyr, atteint les rivages de la Sardaigne et de Carthage. Elle est même adoptée, au VIIIe siècle, par les Grecs qui y introduisent les modifications nécessaires à la transcription de leur langue.

Dans un savoureux livre intitulé Un matin à Byblos, Olivier Germain-Thomas insiste sur la vocation de ce port méditerranéen : « Il existe au bord d’une mer qui fut le nombril du monde, une ville qui porte le nom de Livre. C’est une ville de chevet puisqu’elle a veillé sur les rêves des hommes pendant plus de sept mille ans. (…) Je n’avais pas clairement fait le lien entre Byblos et ma bibliothèque. Et voici que je foulais pour la première fois des pierres effondrées sur des masses de mots. » Ancien ministre français de la Culture, Jack Lang a, dans sa préface à un ouvrage savant intitulé Le livre et le Liban, rappelé, mais moins poétiquement, cette troublante parenté : « Chaque fois que nous prononçons le mot de bibliothèque, nous disons le mot de Byblos, petite ville de la côte libanaise que les Grecs ont identifiée à la matière même du livre. Dès le IIIe millénaire, sur l’argile et sur la pierre, sur le métal et sur le papyrus, se sont répandues ici les premières formes de l’écriture. Ici, vers la fin du XIe siècle avant J.-C., a été inventé l’alphabet consonantique de vingt-deux lettres qui, en apportant à l’expression écrite une simplification décisive, a conquis l’Orient des Grecs, les Etrusques, puis les Latins et, à l’Est, les Araméens, puis les Arabes, chaque civilisation l’adaptant à son génie et à ses langues. A ce don du Proche-Orient, l’Occident a répondu plusieurs siècles plus tard par l’invention de l’imprimerie qu’une pléiade de savants maronites allaient adapter dès le XVIe siècle à l’écriture arabe. »

N’est-il pas légitime, dès lors, que le présent album qui nous parle de livre et de lecture, et qui rend hommage à « la passion de lire », prenne pour point de départ Byblos, berceau de l’alphabet et terre du livre ? Du reste, le Liban, considéré comme « l’imprimerie du monde arabe », a joué un rôle prépondérant dans la diffusion du livre en Orient et a très largement contribué à la Nahda, la Renaissance arabe. Véritable trait d’union entre Orient et Occident, « ce petit pays qui est si important » selon le mot de Metternich a donné naissance à un nombre incalculable d’écrivains d’expression arabe, française ou anglaise, dont Gibran, l’auteur du Prophète, livre-culte vendu à des millions d’exemplaires depuis sa parution en 1923, et a longtemps été un havre de liberté pour les intellectuels de la région, comme Mahmoud Darwich ou Adonis. Cela suffit, avec le symbole incarné par Byblos, à justifier que les photos qui illustrent ce livre et qu’accompagnent des pensées sur la lecture glanées dans les œuvres des écrivains du monde entier aient délibérément pris pour cadre le pays du Cèdre.